vendredi, mars 30, 2007

* Une mondialisation équitable...! Philippe DOUSTE- BLAZY


*** Par Philippe DOUSTE- BLAZY, Ministre des Affaires Etrangères :

** Un enfant meurt du paludisme en Afrique toutes les trente secondes. Seulement 15 000 enfants séropositifs bénéficient d'un traitement dans les pays les moins avancés, quand 600 000 en ont un besoin vital ! A chaque fois, le même constat : les médicaments sont au Nord, quand les malades sont au Sud. Une réalité scandaleuse. Mais prend-on toute la mesure de cette fracture, pas seulement sanitaire, mais éminemment politique ? Les images accablantes du fossé qui divise pays riches et pays pauvres s'affichent en temps réel dans le monde entier. A-t-on conscience que le défi sanitaire et le défi migratoire sont étroitement liés ? Que les inégalités qui se déploient à l'échelle du monde, avec leur cortège de ressentiment et d'humiliations, sont un terreau fertile pour le terrorisme international ? Plus que jamais, le développement, la stabilité, la lutte contre les fondamentalismes, la paix tout simplement, doivent être envisagés ensemble. Réduire la santé à sa seule dimension humanitaire est une faute : la fracture sanitaire est l'un des plus grands enjeux politiques de notre temps. Mais où trouver des ressources «innovantes» ? Les doutes, les scepticismes étaient immenses. Et pourtant, ce formidable défi, Unitaid est en train de le relever.

Aujourd'hui, 34 pays ont adhéré à Unitaid ou se sont engagés à le faire. La facilité internationale d'achat de médicaments réunit en particulier le Brésil, le Chili, la Norvège, le Royaume-Uni, pays fondateurs avec la France, mais aussi dix-huit pays africains, l'Espagne, Chypre et la Corée du Sud. La plupart ont adopté ou sont en passe d'adopter une contribution de solidarité sur les billets d'avion. Une cinquantaine de pays, dont la Chine, participent au groupe pilote. Pourquoi, pour la première fois, des pays d'Afrique et d'Amérique latine ont-ils décidé de s'engager auprès de pays européens en tant que donateurs dans la lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose ?

Ces pays ont fait un choix politique courageux : celui de la mondialisation équitable. Car Unitaid n'est pas une juxtaposition d'actions bilatérales, mais un partenariat qui unit des Etats, dans un élan de solidarité du Nord envers le Sud, mais aussi du Sud envers le Sud. C'est l'amorce d'une démarche citoyenne mondiale : un Français qui aide un Congolais, un Brésilien qui aide un Sénégalais, un Camerounais qui aide un Chilien. C'est un homme, une femme ou un enfant, qui, en prenant l'avion, va aider un autre homme, une autre femme, un autre enfant. Quelle que soit sa nationalité, et de manière totalement anonyme. C'est aussi une nouvelle manière de penser la gouvernance mondiale : au-delà des Etats, Unitaid s'appuie sur le concours d'organisations internationales ­ l'OMS, l'Unicef, le Fonds mondial contre le sida, le paludisme et la tuberculose ­, d'ONG, d'associations de malades et de fondations, comme la Fondation Clinton.

En 2007, un budget de 300 millions de dollars financera l'achat de traitements de qualité à bas prix. Plus de 200 millions de dollars ont déjà été engagées dans des actions qui profiteront à 65 pays dès cette année. C'est cela l'équité : donner à tous des médicaments performants, alors que 25 à 50 % de ceux disponibles au Sud sont contrefaits. Dès 2007, 100 000 enfants séropositifs bénéficieront d'antirétroviraux dans 34 pays d'Afrique et d'Asie, contre 15 000 les autres années. A ce jour, 45 000 enfants sont déjà traités. D'autres traitements arrivent sur le terrain : les antirétroviraux de seconde ligne, les médicaments contre la tuberculose, pour traiter 150 000 enfants, et les nouveaux antipaludéens, pour fournir 12 millions de traitements.

Je crois profondément en cette démarche mondiale de solidarité. Bientôt, le site Internet (1) renouvelé sera le lieu d'échanges de cette communauté. Chacun pourra y consulter, en toute transparence, les montants récoltés. Et pourra ainsi participer à cette démarche citoyenne mondiale.

En tant que président d'Unitaid, j'entends convaincre de nouveaux Etats de participer à ce formidable élan et d'agir pour trouver de nouveaux financements innovants. Les objectifs du millénaire restent loin de portée, alors même que chaque jour le monde s'enrichit davantage. Les fruits de la globalisation existent : nous devons affecter une partie de ces richesses à l'état sanitaire d'urgence du monde. La mondialisation peut réguler la mondialisation : c'est un impératif politique majeur. L'intérêt de celui qui est loin et qui n'a rien, est devenu l'intérêt de tous. Tel est le sens du combat d'Unitaid, dont je veux faire aussi le projet de tous, dans un intérêt mutuel partagé.

(1) www.unitaid.eu

29 mars 2007

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