mardi, novembre 20, 2007

*** L'Europe, c'est toi, c'est moi, c'est nous...Exposition "C'est notre histoire"!***


***A Bruxelles, l'exposition "C'est notre histoire" retrace cinquante ans de construction européenne, à travers des hommes et des femmes ordinaires, issus des 27 pays membres. Visite guidée avec le quotidien belge Le Soir.


"Notre histoire" : deux mots simples pour le sentiment complexe qu'est l'appartenance au passé. Un sentiment diffus mais commun. Une âme. Tel est le biais qu'ont choisi les concepteurs de l'exposition "C'est notre histoire" qui a récemment ouvert ses portes à Bruxelles. Elle est consacrée à la construction européenne, de la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours.

Surtout, elle a été conçue pour le grand public. Chacun d'entre nous contribue en effet à l'unification du Vieux Continent, à sa manière, loin des tables de négociation. L'étudiant part six mois en Erasmus ? Il bâtit l'Europe de la formation. L'agriculteur vend son blé à une multinationale de l'agroalimentaire ? Il construit l'Europe de la consommation. L'électeur vote ? Il "fait" la politique de son pays, un des Vingt-Sept [membres de l'UE].

Ces exemples et mille autres ont renforcé la conviction des concepteurs de l'exposition que le Vieux Continent n'a pu œuvrer à son unification sans ceux qui y vivent. Le propos est matérialisé par les vingt-sept "guides" qui attendent le visiteur tout au long d'un parcours qui s'étend sur 3 500 m2. Vingt-sept personnes, pour la plupart des quidams, une par Etat membre, et qui, au travers de leur vécu, racontent par vidéo interposée leur rôle dans la construction européenne. Il y a Rita la syndicaliste belge, Philippe le Français qui a serré la pince à Roger le Britannique sous la Manche, etc.

L'exposition débute par deux œuvres artistiques, créées respectivement par la Canadienne Dominique Blain et l'Allemand Gunther Demnig, toutes deux vouées à l'état de guerre quasi permanent dans lequel fut plongée l'Europe jusqu'en 1945. Puis commence l'histoire de son unification. Pacifique, réalisée par le truchement de la négociation politique et de l'économie. De l'Europe année 0 qui a découvert les camps de concentration à l'Europe qui ferraille dur dans la mondialisation, des dizaines d'événements ont modelé sa vie et ses frontières. La signature des traités de Rome en 1957, l'avènement de la consommation de masse, la chute du Mur, etc. Tous ces épisodes sont contés à travers 750 objets puisés dans 85 musées européens, des photos, des documents, des activités interactives, etc. Conjugués les uns aux autres, ils composent le plaisir d'apprendre cette part d'histoire.

Des coups de cœur ? La reproduction d'un des DC6 de la Sabena qui permit aux Belges de fuir le Congo [devenu Zaïre, puis aujourd'hui RDC] en 1960. Une cellule d'interrogatoire plus vraie que nature pour opposants aux dictatures. Le très beau Locataire, œuvre de Gloria Friedmann représentant un homme faisant son état des lieux à l'heure de quitter la planète. Un clin d'œil au développement durable.

"C'est notre histoire" est la première exposition permanente organisée par le musée de l'Europe. Depuis une dizaine d'années, l'association a égrené les manifestations. Après plusieurs expos et colloques, après quelques déboires (l'installation manquée sous la gare du Luxembourg), le musée de l'Europe s'offre ici une mise à l'épreuve [créé en 1999, il reste itinérant, faute de disposer à ce jour d'un lieu "bien à lui"]. Du succès de l'opération dépendra peut-être la reconnaissance espérée en tant qu'artisan d'un lieu de mémoire et d'histoire de la construction européenne.

Cinq millions d'euros ont été investis dans "C'est notre histoire". De l'argent collecté auprès des pouvoirs publics, des mécènes privés, mais aussi auprès de la Commission européenne. D'où la question légitime de savoir où est la frontière entre l'histoire et la propagande, fût-elle mise au service d'un système politique dédié à la paix. "L'évocation dans l'expo de certains événements montre que tout n'a pas été rose en Europe depuis cinquante ans, se défend Benoît Remiche, le secrétaire général du musée de l'Europe. Ainsi de la décolonisation, de l'affaire Lumumba, etc. Ou encore la présence de la syndicaliste Rita Jeusette [l'une des 27 guides] dénonçant l'Europe des patrons."

Pascal Martin
Le Soir
Courrier International
19/11/2007

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