***Il y a un an, on vantait le ressort européen face à la crise. On craignait l’inflation, pas vraiment la récession. Le 9 juillet 2008, les taux d’intérêt étaient relevés de 25 points de base. Mais les analystes de la zone se trompaient. Tout comme le reste du monde, l’Europe a chuté. Depuis quelque temps, des lueurs d’espoir se dessinent à l’horizon, au point que certains demandent aux gouvernements de revoir leurs mesures de relance à la baisse. L’Europe s’apprête-t-elle à faire repartir le moteur de la croissance mondiale?
Ce n’était certainement pas le cas il y a quelques semaines. Déjà sonnés par la chute de 6,8 % en taux annualisé de la production affichée dans les derniers mois de 2008, les Européens ont été véritablement assommés par l’effondrement de 9,1 % enregistré entre janvier et mars 2009. La plupart des autres grandes économies se sont également contractées au cours de ce trimestre, mais bien moins que l’Europe. La tendance allait manifestement dans la mauvaise direction, ce qui a conduit à revoir nettement à la baisse les perspectives de croissance paneuropéennes pour 2009.
Les voyants sont plus encourageants depuis quelque temps. En mai, la production industrielle a augmenté en Allemagne, en France et en Italie. Parallèlement, la balance commerciale de la zone euro est sortie plus nettement du rouge. Le secteur manufacturier allemand a enregistré un nombre étonnant de commandes, et la confiance des entreprises comme des investisseurs est en hausse, d’où des espoirs de reprise imminente.
Les signes portent à l’optimisme mais, dans tous les cas, il s’agit de hausses à partir de niveaux très bas. Autrement dit, la chute libre est peut-être terminée, mais on est encore loin de retrouver les niveaux d’activité d’avant. Entre-temps, l’Europe est aux prises avec des problèmes intérieurs de plus en plus graves. Le marché du travail régional continue de pâtir des fortes baisses de la production susmentionnées. Le taux de chômage de la zone est passé de 7,4 % en juin 2008 à 9,5 % en mai 2009, et les chiffres devraient encore se détériorer d’ici la fin de l’année. Normalement, pareilles statistiques de l’emploi suscitent des craintes à court terme. En effet, la nette augmentation du chômage entraîne forcément une hausse du nombre des manquements dans le système bancaire, manquements visant des crédits actuellement considérés comme solides.
Le système bancaire de l’Europe occidentale peut-il faire face à une vague de défauts de paiement? Difficile à dire à l’heure actuelle. Des tests de résistance sont en cours, mais ils semblent bien moins poussés et bien moins transparents que ceux réalisés aux É.-U. En outre, les banques européennes présentent des problèmes structurels plus profonds. Quand la récession est arrivée, le ratio des prêts à l’actif de plusieurs grandes institutions financières était très élevé. De plus, le FMI a exprimé son inquiétude de les voir conserver autant d’actifs toxiques. Sans oublier que les banques européennes sont plus exposées aux économies d’Europe centrale et orientale, qui souffrent beaucoup, globalement, dans la conjoncture actuelle. Enfin, nombre de sociétés financières européennes sont importantes en part du PIB de leur propre pays, ce qui fait qu’un éventuel renflouement se révélerait très onéreux.
Les gouvernements vont-ils prendre de nouvelles mesures? Comme la plupart des autres États, ceux de l’Europe ont annoncé des plans de relance massifs. Malheureusement, ils le seront moins qu’ailleurs. Les baisses de taux d’intérêt ont été moindres et elles sont venues plus tard que dans d’autres grandes économies. Pour l’instant, les mesures financières sont nettement inférieures à la moyenne de l’OCDE, et l’efficacité globale de certains plans clés est contestable. Il ne fait aucun doute que les mesures de relance aideront, mais le doute plane sur leur à-propos.
Conclusion? Il a fallu du temps à l’Europe occidentale pour admettre la gravité de la récession mondiale, et elle doit toujours faire face à de réels problèmes économiques. Il est peu probable, pour l’instant, qu’elle devienne le moteur d’une reprise mondiale mais, en même temps, il n’y aura pas de grande reprise mondiale sans sa pleine participation.
Par Peter G. Hall, Vice-président et économiste en chef, Exportation et développement Canada
Le 15 juillet 2009
*Les vues exprimées dans ce propos sont celles de l‘auteur. Elles ne reflètent pas nécessairement le point de vue d´EDC.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire