***En ce qui concerne le climat, l'Union européenne (UE) est dans le bourbier : la réunion des ministres de l'environnement à Séville, vendredi 15 et samedi 16 janvier, a montré que, pour leur première réunion après la conférence sur le climat de Copenhague en décembre 2009, les responsables étaient incertains et hésitants.
Les ministres ont tenté de tirer un bilan de la participation décevante de l'Europe à Copenhague, qui s'est conclu par un accord non juridiquement contraignant et négocié de facto entre les Etats-Unis et les grands pays émergents du Basic (Brésil, Afrique du Sud, Inde, Chine).
Ce n'est pas à Séville mais devant le Parlement européen que Connie Hedegaard, la prochaine commissaire européenne chargée du climat, a exprimé, le 15 janvier, le sentiment général : "L'Europe a parlé avec beaucoup de voix différentes, à Copenhague, a-t-elle déploré. Parfois, nous étions incapables de négocier tellement nous passions de temps à discuter les uns avec les autres." D'aucuns soulignent cependant que Mme Hedegaard, qui présidait la conférence sur le climat, n'a pas peu contribué à cette cacophonie.
A Séville, les ministres ont surtout discuté de l'offre de réduction des émissions de gaz à effet de serre que pourrait faire l'Europe. Faut-il rester à l'objectif de réduction de 20 % en 2020, ou pousser à 30 %, pour tenter de débloquer les négociations dans la perspective de la réunion au Mexique, en décembre ? Ou rester à 20 %, en attendant que les autres grands pays riches - Etats-Unis et Japon - fassent preuve de plus d'allant ? Si la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne et la Belgique plaident pour 30 %, l'Italie, la Pologne, la Hongrie et l'Autriche pèsent pour rester sur l'objectif de 20 %.
Conclusion de la discussion, résumée par le ministre belge Paul Magnette : "Un débat aura lieu en mars, sur la base d'une étude de comparabilité des offres des autres pays développés, sur la possibilité de porter cet effort à 30 %."
Les pays européens devront cependant, pour se conformer à "l'accord de Copenhague", présenter, le 31 janvier, le chiffre de leurs engagements de réduction des émissions. Selon Teresa Ribera, secrétaire d'Etat espagnole au changement climatique, une réunion du Comité des représentants permanents (Coreper) à Bruxelles, mercredi 20 janvier, précisera les chiffres que l'Europe posera sur la table. L'attitude européenne est d'autant plus hésitante que la nouvelle équipe des commissaires n'est pas encore installée.
Stavros Dimas, le commissaire à l'environnement, qui chapeautait la négociation climatique depuis 2004, va notamment quitter son poste. La discussion n'a par ailleurs guère avancé sur la question du déblocage des fonds promis aux pays pauvres pour faire face aux effets du changement climatique.
ONU, seul cadre formel
Si les Européens paraissent déboussolés, les pays du Basic confirment au contraire l'unité de leur démarche. Ils s'étaient réunis avant Copenhague et étaient venus à la conférence avec un texte de négociation commun.
Vendredi, rapporte le journal China Daily, contrôlé par l'Etat chinois, la commission du développement national et de la réforme (NDRC), dirigée par Xie Zhenhua, l'envoyé spécial du gouvernement pour le climat, a fait savoir que les pays du Basic se retrouveraient en Inde les 24 et 25 janvier pour coordonner la remise de leurs plans de réductions d'émissions au 31 janvier. De son côté, l'Indonésie devrait présenter un plan confirmant son but de réduire ses émissions de 26 % en 2020, rapporte Le Jakarta Post.
Ces différentes démarches se déroulent cependant dans un certain flou, puisque l'accord de Copenhague, qui n'a été signé que par 26 pays, n'a pas de valeur juridique. Il ne précise pas la façon dont ces plans doivent être présentés.
De surcroît, la méthode suivie par les grands pays à Copenhague, qui a consisté à circonvenir les procédures de l'Organisation des nations unies (ONU), ne facilite pas les choses : il s'agit maintenant de revenir dans le processus onusien, alors même qu'il a été stigmatisé par divers ministres, comme Chantal Jouanno, qui déclarait, le 30 décembre 2009, que "le système de l'ONU, tel qu'il est, est obsolète".
Mais dans la mesure où des instances plus restreintes, comme le Forum pour les économies majeures, n'ont pas réussi à parvenir à un accord, l'ONU reste le seul cadre formel dans lequel se poursuit la discussion internationale.
Hervé Kempf
Le Monde
19.01.10
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