*** Aux États-Unis, la presse salue en Sarkozy le candidat « anti-antiaméricains »
* Vu de l'étranger. Outre-Atlantique, on attend de la France qu'elle se débarrasse de sa « haine de l'Amérique ».
Suivre la campagne électorale française, depuis les États-Unis, c'est partir à la découverte d'un pays anachronique, vaguement dangereux, qui aurait devant lui une occasion de changer, mais risque une nouvelle fois de la laisser passer.
De quelque bord qu'il provienne, l'état des lieux est saisissant : « La France est embourbée dans un système économique et social archaïque, surtaxé et surréglementé, frappé de sous-emploi et de sous-productivité, congénitalement immobile quand il n'est pas sporadiquement violent », lit-on dans le numéro de mars d'Atlantic Monthly.
Pour Newsweek, il s'agit de « l'État dirigiste le plus centralisé en dehors de la péninsule coréenne ». Les néoconservateurs Gary Schmitt et Reuel Marc Gerecht veulent oublier « l'extrême gauche et l'extrême droite anti-Macdonald, antimondialistes et anticapitalistes », se prenant à rêver d'une « France postgaulliste, proaméricaine ».
La pierre d'achoppement est là : cette France où le mot antiaméricanisme « est entré dans le dictionnaire en 1968 », relève le Wall Street Journal. Or, voilà que surgit un candidat pas simplement proaméricain, mais « anti-antiaméricains », s'extasie le journal. Il n'est pas le seul : si l'intelligentsia américaine pouvait voter, elle serait tentée par Nicolas Sarkozy, le seul qui ait franchi l'Atlantique pour la courtiser durant la campagne. Lors de sa visite, en septembre dernier, le chef de l'UMP a « proclamé avec fierté » son amitié. Une photo avec George Bush a suffi pour lui coller l'étiquette de « néoconservateur au passeport français. »
Aux États-Unis, où le centre de gravité politique est plus à droite qu'en France, Sarkozy incarne pour Schmitt et Gerecht « un populisme tantôt de droite, tantôt de gauche. » Le Weekly Standard, l'organe des néoconservateurs, voit en lui « l'homme qui veut réveiller la France », le comparant à la fois à Bill Clinton et à Ronald Reagan. Ségolène Royal, elle, a eu droit aux épithètes de « glamour » dans USA Today, d'« exception française » dans Time et d'« innocente » dans le New York Times après son voyage au Proche-Orient. Surtout, elle a été « la femme » - en français dans le texte - dans un long portrait du NYT Magazine, surpris de constater qu'elle n'avait toujours pas d'opinion sur la guerre en Irak.
François Bayrou a fait une apparition plus récente sur le radar des Américains, comme« le candidat du ni-ni », selon le Times, au nom plus facile à prononcer en anglais qu'en français (bye-roo et non bay-roo, explique le journal). Son électorat, « s'il était américain, aurait voté pour Reagan dans les années 1980 et pour Clinton dans les années 1990 », estime le Standard. La comparaison a déjà servi ? C'est que Philip Gordon, de la Brookings Institution, est « frappé par l'américanisation de la politique française ». Ce pays « a manifestement soif de changement », souligne l'Atlantic Monthly. Si au passage il se débarrasse « de sa haine de l'Amérique », se prend à rêver le Wall Street Journal, ce sera un progrès.
PHILIPPE GÉLIE (à Washington).
Publié le 15 mars 2007
Le Figaro
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