samedi, mars 31, 2007

* Un "vainqueur" porté par une "déferlante populiste et réac"...! Québec


*** LE QUÉBEC VU D'AILLEURS :

** La presse internationale n'a pas manqué le rendez-vous des élections québécoises de lundi. Mario Dumont est consacré à l'unanimité comme le gagnant du scrutin. L'analyse diverge cependant sur l'interprétation qu'il faut donner des résultats.

Libération avait anticipé la vague adéquiste et avait publié le jour du scrutin un bref reportage expliquant que "les réacs ont la cote au Québec". Le quotidien de gauche parisien y dressait un parallèle entre le succès de l'animateur de radio Jeff Fillion et celui de l'ADQ. "La carte du vote ADQ recoupe pratiquement la zone où Choi FM, la radio sur laquelle officiait Jeff Fillion, a battu tous ses records d'audience." On peut dire aujourd'hui que cette carte s'étend encore plus loin, et que "l'outsider" décrit par Le Monde a su tirer parti d'une "opinion publique désabusée".

Le Temps de Genève note cependant que "la déferlante populiste" n'a pas ébranlé Montréal et que là se trouve le principal défi que doit affronter Mario Dumont. "Il a su séduire un électorat nationaliste las du Parti québécois en proposant une troisième voie aux Québécois : l'autonomie, sans toutefois donner plus de détails. Si le leader adéquiste est parvenu à canaliser la grogne des campagnes pour la transformer en victoire, la tâche qui se présente aujourd'hui à lui est plus ardue. Aucun candidat de l'ADQ n'a été élu à Montréal. S'il veut obtenir la majorité au Parlement lors des prochaines élections qui pourraient se tenir dans quelques mois, Mario Dumont devra se réconcilier avec Montréal, sans perdre l'appui des régions. Ce test délicat permettra de mesurer la véritable stature politique du nouveau chouchou des Québécois."

Aux yeux de Konrad Yakabuski, du Globe and Mail, ce chouchou a fait émerger un nouveau Québec – mais qui ressemble beaucoup à l'ancien Québec. "Car c'est vraiment le vieux Québec. Celui qui existait avant que la politique québécoise devienne un duopole contrôlé par l'une ou l'autre des factions dominantes – les fédéralistes et les souverainistes. Les électeurs changeaient de majorité au pouvoir comme de litière pour leur chat, avec le même enthousiasme, tous les huit ans." Mais "Super-Mario", le "vainqueur incontesté" des élections, a su manier l'argument de l'identité, "qui est à tout responsable politique ce que la potion magique est à Astérix". Selon Yakabuski, Mario Dumont s'est saisi du débat sur l'accommodement raisonnable pour parler de l'identité québécoise comme les Québécois le souhaitent. "Il a répété tout au long de la campagne qu'il n'avait besoin de la permission de personne pour montrer ce que cela veut dire d'être québécois."

Ce scrutin signe donc la "fin du bipartisme" au Québec, selon Jesus Torquemada, analyste politique pour EITB 24, la chaîne d'information de l'Euskal Irrati Telebista (le service de radio et de télévision publiques du Pays basque). "La fin du système à deux partis" survient grâce à cette percée de l'ADQ, qui, "bien qu'existant depuis plusieurs années, a maintenant trouvé le moyen d'augmenter le nombre des votes en sa faveur en alimentant la peur des immigrants, dont le nombre grimpe chaque jour au Québec".

Le quotidien conservateur madrilène ABC, lui, se félicite de la tournure des événements. Il tire même une diagonale entre l'entente annoncée le 26 mars entre frères ennemis catholiques et protestants en Irlande du Nord pour former un gouvernement de coalition, et les résultats du scrutin québécois. ABC salue l'accord en Ulster et le recul des séparatistes au Québec, et y voit l'avancée simultanée de processus de "normalisation" qui démontre que "les sociétés modernes n'évoluent pas dans un sens unidirectionnel".

Marianne Niosi & Marc-Olivier Bherer
COURRIER INTERNATIONAL
29 mars 2007

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