vendredi, mai 14, 2010

*Le boom des pays émergents dope les entreprises du CAC 40*

***Tandis que l'économie française stagnait, l'activité des entreprises qui composent le CAC 40, elle, est repartie de l'avant au premier trimestre. Leur chiffre d'affaires global a progressé de 5,43 % au cours des trois premiers mois par rapport à la même période de 2009, selon l'étude du cabinet d'audit et de conseil PricewaterhouseCoopers (PwC) réalisée en exclusivité pour Le Monde.

Certes, la performance se compare à un début d'année 2009, point bas dans la foulée de la crise financière de l'automne 2008. Mais après cette année noire, qui s'est soldée par un recul de chiffre d'affaires de 8,86 % sur douze mois, ce regain d'activité apporte la confirmation que, pour les grandes multinationales, la crise est bel et bien terminée. "La majorité des sociétés du CAC40 parlent d'une reprise au premier trimestre, qui devrait se poursuivre sur le reste de l'année", constate Thierry Charron, responsable de l'activité Communication financière de PwC.

"On se situe dans une phase de montée en puissance de la reprise. Les anticipations de résultats étaient assez ambitieuses et elles sont dépassées, ce qui conforte notre optimisme : on pourrait assister à une hausse de 30 % des résultats sur l'ensemble de 2010", assure Romain Boscher, directeur des gestions chez Groupama Asset Management.

Les grandes entreprises françaises sont actrices d'une sortie de récession à plusieurs vitesses entre des pays émergents qui tournent à plein régime – Chine en tête –, des Etats-Unis qui accélèrent et une Europe qui reste à la traîne.

L'EXEMPLE DE PERNOD RICARD

Les résultats du premier trimestre démontrent la capacité des fleurons français à tirer partie de cette reprise à plusieurs détentes. D'où une certaine déconnexion entre leurs performances et celles de l'économie française.

A ce titre, l'exemple de Pernod Ricard est symptomatique : le groupe de spiritueux est allé chercher la croissance auprès des nouveaux consommateurs des pays émergents, ce qui lui permet de compenser une croissance assez atone dans les pays développés. C'est aussi le cas, mais de façon moins marquée, pour LVMH, Danone ou L'Oréal.

Le secteur automobile, lui, connaît une situation très particulière. Peugeot et Renault ont largement profité des mesures gouvernementales de soutien à l'économie, comme les primes à l'achat. Bien que partiellement supprimées, elles ont continué à produire leurs effets, car ce sont les voitures commandées fin 2009, livrées début 2010, que l'on retrouve dans les chiffres d'affaires du premier trimestre.

En revanche, l'après-prime à la casse s'annonce délicat, et les progressions du premier trimestre en Europe auront du mal à être rééditées sur le reste de l'année.

Parmi les déceptions, on notera le secteur de la construction. Le dynamisme des pays émergents n'arrive pas à compenser l'atonie du marché européen – notamment en Espagne – ou nord-américain. Par ailleurs, le secteur a pâti de conditions climatiques qui ont perturbé les chantiers.

Dans ce contexte, la croissance pour Lafarge reste une promesse : le chiffre d'affaires du premier trimestre chute lourdement de 8 %. "Le potentiel de rebond du groupe est considérable après une perte de 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires en deux ans dans les pays développés", estime toutefois le PDG du groupe, Bruno Lafont. Mais ce sera pour plus tard.

Pour Michelin, la croissance est déjà une réalité : les volumes de pneumatiques progressent de 15,3 % pour un chiffre d'affaires qui augmente de 12,2 %. La préoccupation du groupe est maintenant concentrée sur le prix des matières premières, qui est en train de s'envoler. La question est de savoir si Michelin pourra continuer à augmenter ses prix pour compenser la flambée, comme il a réussi à le faire jusqu'à présent.

REDÉMARRAGE DES INVESTISSEMENTS

Côté secteur bancaire, les provisions pour actifs toxiques sont clairement derrière, et ce premier trimestre marque enfin le retour à une certaine sérénité de ce point de vue.

Mais au-delà de ces hétérogénéités sectorielles, les entreprises du CAC 40 sortent de la crise avec des bilans solides tant en termes d'endettement que de liquidités disponibles. "C'est un constat général, qu'on avait rarement observé à l'issue des précédentes récessions", note Alain Bokobza, directeur de l'allocation mondiale d'actifs de la Société générale CIB.

Grâce à une bonne réactivité, ces grandes entreprises se retrouvent aujourd'hui à la tête de trésoreries abondantes. Parallèlement, elles ont réduit rapidement et drastiquement leurs coûts. "Cette discipline devrait avoir un impact assez impressionnant sur les bénéfices de 2010, anticipe M.Boscher. Le levier financier, qui s'exerçait grâce à un recours important à la dette avant la crise, a été remplacé par ce levier opérationnel, qui devrait permettre d'atteindre des niveaux de rentabilité assez proches de 2008, et de renouer avec des profits record à l'horizon 2012."

Quant au mouvement baissier de l'euro observé dans la foulée de la crise grecque, il n'a pas eu le temps de produire ses effets sur les entreprises du CAC 40. Mais l'effet dopant sur les exportations devrait s'observer dès le deuxième trimestre.

Autre bonne nouvelle, le redémarrage des investissements. "On sent qu'un nouveau cycle d'investissement dans les nouvelles technologies est en train de débuter; ce n'est pas un hasard si Cap Gemini est l'une des meilleures performances du CAC 40", note M. Bokobza, qui observe le même phénomène dans le secteur pétrolier.

Enfin, les fusions-acquisitions sont de retour : "On entend des messages nouveaux de la part des entreprises à propos de leur volonté de participer à ces mouvements, qui ont déjà commencé en Asie." Ce retour des grandes manœuvres pourrait être interprété comme le signe ultime que la reprise est bel et bien là.

Stéphane Lauer
Le Monde
15.05.10

Bien à vous,

Morgane BRAVO

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