lundi, janvier 02, 2012

*Présidence danoise du Conseil de l’UE : Helle Thorning-Schmidt... Nous avons besoin d'une Europe plus responsable*

Mme Helle Thorning-Schmidt, Premier Ministre du Danemark
Helle Thorning-Schmidt, Premier ministre danois, affirme dans un entretien exclusif pour le site du Conseil, que la présidence danoise, au premier semestre 2012, se donnera pour priorité essentielle de faire de l'Europe une économie responsable, qui soit ainsi en mesure de surmonter les crises et de repartir dans la bonne voie.
Madame le Premier ministre, quelles seront pour votre présidence, qui est déjà la septième présidence danoise du Conseil de l'UE, les priorités en cette période cruciale pour la construction européenne?
La présidence danoise a quatre priorités principales: en premier lieu, nous avons besoin d'une Europe plus responsable. Nous devons faire de l'Europe une économie responsable afin qu'elle puisse surmonter la crise et repartir dans la bonne voie. Les règles économiques doivent être mises en œuvre efficacement afin de rétablir la confiance des marchés financiers dans les économies européennes. Deuxièmement, nous avons besoin d'une Europe plus dynamique. Il nous faut rétablir la croissance en Europe. L'assainissement à lui seul ne suffira pas à assurer la création de nouveaux emplois en Europe. Ce qui nous amène d'ailleurs à la troisième priorité: une Europe verte. Grâce à de nouvelles initiatives dans les domaines, par exemple, de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables, nous pouvons générer en Europe une croissance verte. Enfin, nous avons besoin d'une Europe sûre. À l'ère de la mondialisation, la sécurité et la liberté de nos citoyens ne peuvent être assurées que par des efforts concertés au niveau européen.
Le Danemark va assumer la présidence dans une période de crise; l'Europe est confrontée à de très grandes difficultés. La crise pèsera sur toutes nos décisions dans les six mois qui viennent et au‑delà. Mais cela ne fait que souligner l'importance de parvenir à des résultats concrets si nous voulons remettre l'Europe sur pied. La réalisation de ces quatre priorités est à mon sens essentielle pour créer les conditions de la croissance et de la création d'emplois à l'avenir.
Comment la présidence danoise pourrait-elle contribuer efficacement aux efforts engagés pour faire face à la crise de la dette souveraine dans la zone euro et pour améliorer la gouvernance économique, alors que vous ne participez pas à l'euro?
Il est important de comprendre que la crise de la dette ne peut être circonscrite à la zone euro. Tous les États membres de l'UE doivent mener des politiques économiques saines, alliant les efforts d'assainissement voulus à des réformes tout aussi nécessaires.
En tant que pays n'appartenant pas à la zone euro, le Danemark peut et tient à apporter sa contribution aux tâches importantes qui s'imposent aujourd'hui. Dans le cadre de sa présidence, le Danemark tirera pleinement parti des règles renforcées de gouvernance économique consacrées par le paquet dit "six-pack" sur lequel tous les États membres ont marqué leur accord. Nous nous servirons du cadre qu'offre le semestre européen pour contribuer à ce processus en veillant à ce que chaque État membre mène une politique économique responsable qui lui soit bénéfique mais qui profite aussi à l'UE dans son ensemble.
Les décisions adoptées par le Conseil européen le 9 décembre, visant à renforcer la discipline budgétaire et à assurer la stabilité économique, seront mises en œuvre dans les mois qui viennent. L'objectif de ces décisions concorde avec le but de la présidence danoise de rendre l'Europe plus responsable.
Comment l'Europe peut-elle concilier des mesures d'austérité et une stimulation de la croissance économique dans l'UE?
L'assainissement ne peut pas (et ne doit pas) être le seul moyen mis en œuvre pour remettre l'Europe sur la bonne voie. Il nous faut nous tenir sur nos deux jambes et conjuguer assainissement et croissance économique. L'UE a déjà défini des objectifs ambitieux dans sa stratégie de croissance "Europe 2020", et les États membres ont défini des objectifs au niveau national. En outre, cinq priorités, qui s'inscrivent désormais dans le programme du semestre européen, ont été définies dans le cadre de l'examen annuel de la croissance.
Nous avons donc, pour l'essentiel, déterminé ce que nous devions faire; il nous faut maintenant joindre le geste à la parole. Le Danemark, dans le cadre de sa présidence, fera tout ce qui est en son pouvoir pour tirer pleinement parti du marché unique, qui offre encore des possibilités inexploitées. Conformément aux conclusions du Conseil européen, nous nous emploierons à mettre en œuvre d'urgence les initiatives qui offrent les possibilités de croissance les plus importantes. Nous nous emploierons en outre à promouvoir un programme ambitieux dans le domaine de l'économie verte, permettant à l'UE de mettre pleinement à profit sa position de leader dans les domaines de l'énergie et du climat afin de favoriser une croissance verte.
Austérité et croissance ne sont pas antinomiques, au contraire. Une politique économique responsable est un préalable indispensable à la croissance, et la croissance est une condition pour sortir de la crise.
Quels sont, pour la présidence danoise, les domaines sur lesquels il convient d'axer le budget de l'UE pour la période 2014-2020?
Les négociations sur le budget de l'UE pour 2014-2020 seront un des dossiers principaux à traiter durant la présidence danoise et nous ferons tout ce qui sera en notre pouvoir pour mettre au point un socle de propositions, en vue des négociations finales qui se tiendront au cours du deuxième semestre 2012. Le budget de l'UE est un instrument essentiel pour promouvoir les politiques européennes. Dans l'exercice de la présidence, nous nous mettrons à l'écoute des États membres et de leurs intérêts afin que soit élaboré un budget qui apporte aux citoyens européens une véritable valeur ajoutée. Dans les circonstances actuelles, il m'apparaît particulièrement important que le budget de l'UE, dans toute la mesure du possible, soutienne la croissance et l'emploi.
Quels changements faut-il imprimer au marché unique pour qu'il continue de porter ses fruits dans les vingt années qui viennent?
Nous devons moderniser le marché unique pour qu'il continue de favoriser les échanges et la croissance dans toute l'UE. Nous approuvons pleinement l'Acte pour le marché unique de la Commission européenne, qui sera l'une des priorités importantes de notre présidence. La législation relative au marché unique doit être modernisée et simplifiée pour garder toute sa pertinence au regard de la concurrence mondiale, faciliter la vie des acteurs économiques et améliorer l'accès aux marchés publics. Nous devrions aussi garantir l'accès au capital-risque qui revêt une importance toute particulière pour les petites et moyennes entreprises. Et nous devrions avancer dans la réforme du brevet européen afin de stimuler l'innovation. Enfin, il existe encore bien des possibilités de développer le marché unique numérique, de façon à ce que les consommateurs puissent faire toute confiance au commerce transfrontière via l'internet, et que les entreprises soient encouragées à mettre au point des produits et services numériques nouveaux.
Ces améliorations sont nécessaires pour que le marché unique continue de porter ses fruits dans les vingt années qui viennent. Comme un véhicule en service depuis vingt ans, il lui faut, de temps à autre, un entretien.
Comment comptez-vous convaincre les autres États membres que, même en cette période de crise, l'Europe devrait promouvoir les politiques favorables à une économie et une croissance vertes, et devrait investir davantage dans les technologies vertes, les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique?
Je leur dirai que nous n'avons pas le choix. D'aucuns pensent peut-être qu'une Europe plus "verte" et plus engagée dans un développement durable est une préoccupation nordique et inutile. Je ne suis pas d'accord. L'Europe a une occasion unique de se lancer dans les prochains mois sur la voie d'une croissance verte compétitive. La présidence danoise centrera son action, à cet égard, sur notre objectif commun d'une augmentation de 20 % d'ici 2020 de l'efficacité énergétique, en s'efforçant de faire avancer le plus possible les négociations sur la directive importante qui a été proposée dans ce domaine. Ce sera un signal clair, envoyé aux marchés européens, qu'il existe une demande pour des solutions nouvelles et innovantes. Nous nous appuierons également sur les communications de la Commission concernant une économie à faible intensité de carbone et une feuille de route pour l'énergie, afin de doter l'Europe de la bonne stratégie à long terme dans le domaine de l'énergie et du climat. Nous savons ce que nous voulons obtenir en 2050, mais nous avons besoin d'une stratégie bien pensée pour y parvenir. Si nous nous engageons dans la bonne voie dès maintenant, en mettant en place des mesures incitatives vigoureuses et en créant les bases solides qui permettront à une industrie verte européenne de prospérer, nous aurons assuré croissance, emplois et environnement propre à nos citoyens et leurs enfants.
Quelles initiatives la présidence danoise entend-elle lancer pour améliorer la sécurité tant extérieure qu'intérieure en Europe?
Le Danemark estime que nous avons besoin d'une Europe sûre, où chaque citoyen peut exercer librement un des acquis majeurs de l'Union européenne: la liberté de circulation. Mais nous devons aussi nous employer efficacement à résoudre les difficultés créées par cette liberté de circulation. Il faut pour cela renforcer la coopération entre les États membres et entre leurs autorités. Au cours de la présidence danoise, nous nous efforcerons par exemple de faire avancer les négociations sur la décision d'enquête européenne. Cet instrument sera très utile pour faciliter la tâche des services de police en matière de criminalité transfrontière. Il n'y a aucune raison que nous ayons de moins bons résultats dans une affaire criminelle uniquement parce que l'enquête concerne plusieurs États membre. Nous nous emploierons également à développer encore l'espace Schengen, en le dotant de nouveaux instruments permettant d'évaluer les situations difficiles et d'y remédier, notamment en cas de très forte pression aux frontières extérieures menaçant le fonctionnement du système tout entier. Notre principal objectif, après tout, ne devrait-il pas être de garantir, pour nos citoyens, les droits et les libertés que nous sommes parvenus à instaurer pour eux?



Bien à vous, 

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