mercredi, juillet 01, 2009

*Grandeur et décadence de la présidence tchèque...*

***En ce 1er juillet, Prague cède la présidence de l’UE à Stockholm. Malgré des échecs enregistrés au cours de leurs six mois d'exercice, les Tchèques n’ont pas à rougir de leur prestation, estime Hospodárské Noviny.

Le bilan de la présidence tchèque de l’Union européenne peut être tiré. On peut redouter qu’il ne soit pas des plus flatteurs. Pendant six mois, nous avons eu un espace exclusif pour montrer de quoi nous étions capables, mais nous l’avons utilisé pour nous ridiculiser. On se souviendra de cette présidence comme d’une tragi-comédie praguoise à rebondissements. On ne peut pas vraiment dire que les Tchèques ont défendu moins d’idées que les Français. Nous avons sans doute à notre actif plus de succès concrets, mais les Français ont su paraître plus dynamiques. Nous avons nous-mêmes confirmé notre image de petit pays incapable d’être à la hauteur de la tâche, une image esquissée dès le début de cette présidence par Nicolas Sarkozy.

Une rapide comparaison entre les présidences tchèque et française montre bien la force du marketing. “Les Tchèques n’ont pas su sortir de l’ombre de la France”, a noté Tony Barber, le correspondant très écouté à Bruxelles du Financial Times. Rappelons-nous des images de la présidence française. Sarkozy l’énergique, sans cesse entre deux avions, un jour à Berlin, le lendemain à Paris, Bruxelles, Londres ou Moscou. De sommet en conférence de presse, de multiples photos montrent les chefs d’Etats européens unis autour d’un Sarkozy triomphant. De grands principes énoncés à la recherche du capitalisme de demain. Puis d’incessantes remontrances à l’adresse des Tchèques qui, selon le Premier ministre François Fillon, n’ont pas su faire plus que “l’Europe des petits pas et des petits compromis”. Vraiment ?

Comme Sarkozy, nous aussi, nous avons pris la présidence de l’Union européenne (UE) dans une période difficile. L’intervention israélienne à Gaza et le conflit gazier entre Moscou et Kiev, pour commencer. A Gaza, en se faisant doubler par Sarkozy, nous n’avons pas vraiment brillé. Mais nous avons bien mené les navettes diplomatiques extrêmement compliquées entre Poutine et Timochenko, aidant à résoudre relativement vite cette crise du gaz. Ensuite, Sarkozy lui-même nous a dicté notre agenda, avec ses idées protectionnistes [sur l’industrie automobile]. Avec habileté, nous avons endossé le rôle de protecteurs du libre marché, sans pour autant pouvoir nous opposer à la déferlante européenne de la prime à la casse. Parmi les mérites tchèques, il convient de mentionner également l’accord sur l’investissement du gazoduc Nabucco et celui, qui pendant des années avait paru insoluble, sur la baisse de la TVA dans la restauration et les services.

Tous ces bons résultats ont été balayés fin mars, lorsque tous les journaux européens ont titré sur la fin du gouvernement tchèque. L’opposition soutenue par le président Václav Klaus a renversé le Premier ministre Topolanek. On se souviendra aussi de l’œuvre Entropa, représentant les pays européens sous des clichés simplistes : la France = la grève, l’Allemagne = la croix gammée, la Bulgarie = les WC à la turque… [voir CI n°951, du 22 janvier 2009]. L’embarras s’en est trouvé décuplé, lorsque nous avons décidé de nous excuser – de façon embarrassée – pour notre humour tchèque. A cela les médias ont rajouté l’euroscepticisme grandissant du président Klaus et enfin les photos du Premier ministre Topolanek nu dans la villa sarde de Silvio Berlusconi.

Dans les affaires, ce n’est pas nécessairement celui qui sait faire la meilleure chose qui gagne, mais celui qui sait créer autour de lui l’image la plus séduisante pour mieux la vendre. Après vingt ans de liberté politique, les entreprises tchèques ont toujours mille ans de retard sur les entreprises occidentales dans ce domaine. En politique et dans l’art de se créer une image, ce retard est encore plus grand. Malgré nous, nous avons ainsi écrit un nouveau chapitre important sur deux mythes très exotiques, à savoir la confusion praguoise et la supériorité française.


Lenka Zlamalova 
Hospodárské Noviny
01.07.2009 
Courrier International

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