Document de réflexion pour le Forum mondial de la démocratie 2013
Exploiter le web comme outil de démocratie : nouvelles pistes pour
l’étude et la pratique de la démocratie numérique
Amanda Clarke, Université d'Oxford
"Dans le monde entier, les électeurs boudent les urnes, les adhérents se détournent des partis politiques et les citoyens se disent, dans des proportions alarmantes, à la fois méfiants et mécontents de leurs dirigeants politiques. Dans le même temps, on peut lire des comptes rendus de manifestations impressionnantes coordonnées via le web, prendre connaissance d’informations politiques échangées sur les réseaux sociaux, signer des pétitions en ligne et faire des dons en faveur d’initiatives de financement participatif. Quel rôle joue internet dans une démocratie à l’heure où de nombreuses activités démocratiques « hors ligne » sont en déclin ? C’est à cette question que le présent rapport tentera de répondre, tout en proposant de nouvelles pistes pour l’étude et la pratique de la démocratie numérique.
Le rapport est structuré en cinq parties. La première présente des données globales de haut niveau, qui attestent d’un recul des modes de participation politique « traditionnels » comme le vote, l’adhésion à un parti, l’affiliation à un syndicat ou le militantisme. La deuxième partie montre qu'en dépit des attentes la première phase de participation politique sur internet n’a pas permis de remédier à ces tendances inquiétantes.
La troisième partie explique que le web n’en a pas moins un rôle important à jouer dans la démocratie telle que nous la connaissons aujourd’hui et que la meilleure façon de définir ce rôle est de commencer par examiner les fonctionnalités du web en tant que moyen de communication. Internet permet à des personnes ayant des intérêts communs de former des communautés, qui pourront faciliter l’engagement politique dans des espaces non politiques. Le web réduit les coûts d’échange de l’information et de collaboration, faisant ainsi émerger des modèles d’engagement citoyen novateurs. Enfin, en plus d’être une plateforme d'engagement démocratique, il est aussi un outil d’étude. Les données massives et les méthodes de recherche basées sur le web apportent un nouvel éclairage sur les mécanismes de l’action collective, qui pourrait aider les institutions politiques et la société civile à mieux concevoir les initiatives en faveur de l’engagement dans les années à venir.
La quatrième partie est également consacrée aux fonctionnalités du web, mais pour souligner qu'internet peut être utilisé pour porter atteinte aux idéaux démocratiques. Les questions soulevées par l’engagement sur le web – surveillance de l’Etat, censure en ligne, problème de transparence – montrent qu’il ne faut pas se livrer à des analyses déterministes fondées sur la technologie en partant du principe que le web est forcément un allié de la démocratie.
La cinquième partie, qui conclut le rapport, contient une série de recommandations. Les chercheurs doivent mieux intégrer dans leurs analyses les méthodes de recherche basées sur le web et les données générées par le web, en utilisant ces nouveaux éléments pour élaborer des recommandations à l’attention de la société civile et des institutions politiques. De leur côté, les groupes de la société civile doivent mener une réflexion plus créative et plus stratégique sur la façon dont ils se servent des médias numériques à des fins de recrutement, de collecte de fonds et de sensibilisation et pour passer au crible l’action des gouvernements. Enfin, avec
l'émergence de nouveaux modes de participation et la meilleure connaissance des mécanismes d’engagement, les gouvernements et les parlements devront réviser voire abandonner leurs pratiques actuelles de démocratie représentative pour inverser les tendances préoccupantes décrites au début de ce rapport.
Introduction
La démocratie est‐elle en déclin ? Les taux de participation aux élections diminuent, les partis peinent à attirer de nouveaux membres et les citoyens sont nombreux à exprimer leur méfiance à l’égard des institutions politiques. Dans un tel contexte, il serait pour le moins difficile de conclure à la bonne santé de la démocratie, mais il est tout aussi difficile d’affirmer qu’elle est en péril alors que les citoyens parlent de politique sur internet au quotidien, que les technologies numériques offrent à chacun de nouvelles possibilités de contribuer aux travaux des institutions politiques, que des pétitions en ligne recueillent des millions de signatures et que les réseaux sociaux sont utilisés pour coordonner de gigantesques manifestations. Les activités « traditionnelles » associées à la démocratie représentative sont certes en déclin, mais ce déclin peut être compensé ou inversé grâce à la démocratie numérique apparue ces dernières années. Le présent rapport examine ces tendances et transitions tout en proposant de nouvelles pistes pour l’étude et la pratique de la démocratie numérique.
La première partie présente des données qui mettent en évidence le déclin de la politique en démocratie au cours des dernières décennies. Les citoyens sont à la fois de moins en moins nombreux à aller voter, à adhérer à un parti et à signer des pétitions et de plus en plus nombreux à exprimer un désintérêt et un mécontentement à l’égard de la politique.
La deuxième partie expose les thèses des premiers observateurs de la démocratie numérique. Elle confronte les points de vue optimistes des cyberenthousiastes, qui estimaient que le web redonnerait vie à la politique dans les sociétés contemporaines, et les arguments des cybersceptiques, dont les études empiriques tendaient à montrer que le web n’était pas une panacée pour les démocraties en difficulté.
La troisième partie s’intéresse aux recherches récentes et va au‐delà de la dichotomie cyberenthousiastes/cybersceptiques qui a dominé les premières études sur la démocratie numérique. Le web ne devrait pas être évalué comme outil de la démocratie au regard des modèles du passé. Il faudrait adopter une approche plus efficace, en commençant par examiner les fonctionnalités d’internet, et se demander comment exploiter celles‐ci pour promouvoir l’engagement démocratique aujourd’hui. Dans cet esprit, le rapport donne trois exemples dans lesquels les possibilités uniques qu’offre le web comme moyen de communication sont une source d’espoir pour la pratique démocratique : internet est un moyen de faire de la politique dans des espaces non politiques ; il fait émerger des formes novatrices d’engagement citoyen comme l’externalisation ouverte (crowdsourcing) ; il permet de mieux comprendre et évaluer les mécanismes de l’engagement démocratique.
La quatrième partie met en garde contre les approches déterministes fondées sur la technologie, qui n’envisagent pas la possibilité que le web puisse être utilisé pour porter atteinte aux idéaux démocratiques. Vient ensuite la cinquième partie du rapport, qui présente une série de recommandations destinées aux chercheurs, à la société civile, aux gouvernements et aux parlements, indiquant à chacun comment mieux tirer parti du web en tant qu’outil d’engagement démocratique dans les années à venir.
Partie 1 — Le déclin de la politique démocratique traditionnelle
Globalement, le taux de participation aux élections démocratiques n’a pas cessé de diminuer depuis 1980 à travers le monde. Sur 49 démocraties1, 40 ont enregistré une baisse de la participation aux élections législatives entre 1980‐84 et 2007‐2013. En moyenne, le taux a diminué de 10 points dans ces 49 pays2..."
Link :
*#CoE_FWD à Strasbourg : Bref Aperçu...5 au 11 octobre 2012*
A SUIVRE...!
Bien à vous,
@MorganeBravo