Une union politique pour l'Europe
par La Fondation Robert Schuman
Résumé :
Ce texte vise à identifier un certain nombre de propositions concrètes dans le but de fournir un contenu précis et opérationnel au projet de renforcement de la légitimité et du contrôle démocratiques des décisions européennes. La présidence du Conseil européen vient d'inviter les Etats membres à lui soumettre leurs recommandations sur ce point dans le cadre des travaux portant sur la réforme de l'Union économique et monétaire.
La faisabilité juridique de chacune des propositions identifiées est analysée en identifiant le type de réforme qu'elles supposent : innovations à traité constant ; modifications limitées du Traité au titre de la procédure de révision simplifiée; modifications plus larges du Traité au titre de la procédure de révision ordinaire.
Introduction
Avec la crise, des débats fondamentaux sur l’avenir de l’intégration européenne sont posés. Pour retrouver leur souveraineté face aux marchés et ainsi la capa- cité de décider de leur avenir, les Etats européens – notamment ceux qui sont membres de la zone euro – ont compris qu'ils devaient former un ensemble plus cohérent. De ce fait, le projet d'union bancaire a pro- gressé rapidement ces derniers mois. Les débats se poursuivent sur les points de désaccord en matière d'union budgétaire (notamment l'opportunité de mu- tualiser une partie de la dette), mais déjà des règles communes plus strictes ont été adoptées et le Méca- nisme européen de stabilité (MES) doit entrer prochai- nement en vigueur.
Compte tenu des transferts de compétences que ces dispositifs communs impliquent, la question de l'union politique ne peut plus être éludée. Les décisions euro- péennes doivent bénéficier d'une légitimité suffisante aux yeux des citoyens et les mécanismes de décision doivent être suffisamment simples et clairs pour qu'ils soient efficaces et transparents. Sans cela, l'union éco- nomique ne rencontrera pas l'adhésion des citoyens et les interrogations se poursuivront quant à la vision politique qui justifie les décisions européennes. In fine, c'est l'intégration économique dans son ensemble qui se trouvera affaiblie, voire menacée.
Le débat existe dans plusieurs Etats membres – il est notamment engagé au plus haut niveau en Alle- magne. Pourtant, la réflexion sur ces sujets paraît peu structurée. Angela Merkel a semblé exprimer le sou-
hait de réunir une nouvelle Convention et José Manuel Barroso, Président de la Commission européenne, s’est prononcé en faveur d’une « fédération démo- cratique d’Etats-nations »[1]. Inversement, Mario Draghi, Président de la BCE, a estimé que « ceux qui affirment que seule une véritable fédération pourrait être durable placent la barre trop haut »[2]. Par ail- leurs, tandis que de nombreux tabous sont en train de tomber concernant l’avenir de la construction euro- péenne, le débat sur la dimension politique et démo- cratique de la réforme des institutions européennes est absent dans de nombreux Etats membres, et notamment en France.
La réflexion a néanmoins été lancée dans le cadre de la mission qui a été confiée au "Groupe des 4" (Herman Van Rompuy, Jose Manuel Barroso, Mario Draghi et Jean-Claude Juncker). Ce groupe a remis un pre- mier rapport lors du Conseil européen de juin (« Vers une véritable Union économique et monétaire » [3]) et a identifié quatre enjeux structurants : un cadre fi- nancier intégré, un cadre budgétaire intégré, un cadre économique intégré et un renforcement de la légitimité démocratique et l’obligation de rendre des comptes.
Si les trois premiers axes ont fait l’objet de nombreux travaux ces derniers mois[4], le dernier fait figure de parent pauvre dans le débat actuel. Il existe déjà quelques contributions sur ce sujet[5], dont celle signée par les ministres des Affaires étrangères de 11 Etats membres qui peut être considérée comme la première tentative de formalisation au plus haut niveau d’un projet d’ « union politique »[6].
Thierry Chopin
directeur des études de la Fondation Robert Schuman, Professeur associé au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).
Jean-François Jamet
porte-parole d’EuropaNova, enseigne l'éco- nomie politique européenne à Sciences Po.
François-Xavier Priollaud
administrateur de l’Assemblée nationale
La suite :
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