***Après presque deux ans, l’effondrement du marché du logement américain fait encore les manchettes. Ce n’est pas étonnant, vu la dégringolade spectaculaire, ses effets secondaires et les signes bien maigres d’une reprise. Mais les États-Unis ne sont désormais plus seuls. Les marchés du logement chancellent maintenant dans d’autres grandes économies.
Le marché du logement américain a beaucoup attiré l’attention pour plusieurs raisons. Il a trébuché bien avant les autres marchés, l’activité a plongé rapidement vers les niveaux caractéristiques d’une récession, et la déroute du marché hypothécaire qui a suivi a infecté le système financier mondial. Qui plus est, la reprise n’est pas imminente. Le marché américain est saturé de logements excédentaires, et il pourrait falloir bien plus d’un an pour éliminer les excédents. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que l’encre cesse de couler bientôt.
Mais d’autres économies se retrouvent sous les projecteurs elles aussi. Les marchés du logement européens sont à diverses étapes d’une correction. Le Royaume-Uni semble actuellement en plein recul. Les données pour mai indiquent que les mises en chantier d’habitations ont plongé de 56 % par rapport à l’an dernier, et les ventes ont fléchi de 37 % pendant la même période, après une baisse mensuelle de 13 %. Les propriétaires sont aux prises avec une hausse des taux hypothécaires, et les prix des maisons commencent à diminuer. Les excédents sur le marché laissent penser que, comme sur le marché américain, la reprise n’est pas pour demain.
L’Espagne est aussi au cœur de la correction européenne. Les mises en chantier d’habitations au premier trimestre ont diminué de 18 % et les prêts hypothécaires ont régressé de 13 % par rapport à 2007. La brusque correction a révélé d’autres marchés surchauffés, et les prévisions économiques sont révisées à la baisse en conséquence. En France, les mises en chantier ont chuté abruptement par rapport à la croissance époustouflante de 2007 et ont reculé de près de 17 % en mai. Les permis de construire demeurent bien plus nombreux que les mises en chantier, et les prêts hypothécaires affichent encore une croissance positive, ce qui laisse supposer que la correction en est toujours à ses premiers balbutiements. Le marché du logement reste faible en Allemagne et, à l’autre bout de la planète, les mises en chantier d’habitations ont baissé en avril de 9 % au Japon par rapport à l’an dernier.
Les marchés du logement sont déterminants dans les perspectives économiques, pour plusieurs raisons. D’abord, ils sont un important indicateur avancé de l’activité économique. Une correction des marchés du logement laisse presque toujours présager un ralentissement ou une récession ailleurs dans l’économie. Ensuite, les marchés du logement sont volatiles et ils peuvent infléchir rapidement l’impression générale de bien-être économique.
Enfin, à divers degrés selon l’économie dont il est question, les consommateurs prennent des décisions de dépense en partie en fonction de la valeur perçue de leur maison, qui constitue dans la plupart des cas leur actif le plus précieux. Quand les prix stagnent ou diminuent, les consommateurs, en particulier ceux qui sont fortement endettés, peuvent reculer rapidement. Il y a aussi une incidence sur les marchés des capitaux. L’effet continu de l’effondrement du marché hypothécaire à risque sur les marchés mondiaux des capitaux illustre bien l’influence d’une correction du marché du logement.
Étonnamment, le Canada a évité jusqu’ici un ajustement du marché du logement. Les mises en chantier augmentent rapidement à cause de la vigueur de l’économie intérieure et d’une forte dose de stimulants budgétaires très opportuns. Mais ce pourrait bientôt être le tour du Canada. Même si les déséquilibres sur le marché semblent petits, les mises en chantier actuelles dépassent largement les besoins et elles ne continueront probablement pas indéfiniment au rythme actuel.
Conclusion? Les mises en chantier sont en chute libre dans les plus grandes économies du monde, et il faudra du temps pour éponger les excédents. Tout laisse présager une faiblesse mondiale persistante jusqu’à la fin de 2009.
Peter G. Hall
Vice-président et économiste en chef
Exportation et développement Canada
9 juillet 2008
*Les vues exprimées dans ce propos sont celles de l‘auteur. Elles ne reflètent pas nécessairement le point de vue d´EDC.
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