*** La plupart des pays européens se sont dotés de législations pour assurer la transparence des revenus de leurs dirigeants et tenter ainsi, avec plus ou moins de bonheur, d'éviter les conflits d'intérêt.
En Italie, où Silvio Berlusconi, deux fois chef du gouvernement et aujourd'hui leader de l'opposition, n'a jamais cessé de défrayer la chronique avec son empire médiatique, ministres et parlementaires sont tenus de rendre publiques leurs déclarations d'impôts. La presse peut ainsi éplucher les revenus, les participations, les propriétés ou les voitures possédées. Mais le système n'empêche pas une certaine opacité. Une bonne partie des participations de M. Berlusconi ont été longuement placées dans des sociétés-écran appelées Holding Italiana et suivies par un chiffre. Sa déclaration énumère ainsi trois box auto, cinq appartements à Milan, ainsi que trois yachts. Mais pas de traces de ses villas en Sardaigne qui formellement appartiennent à ses sociétés.
En Grande-Bretagne aussi, la législation en vigueur n'a pas empêché, ces dernières années, plusieurs scandales retentissants. Eminence grise et ami personnel du premier ministre, Peter Mandelson, aujourd'hui commissaire européen, avait dû quitter son poste de ministre du commerce et de l'industrie en 1998, après la révélation d'un gros emprunt personnel contracté auprès d'un autre ministre, le richissime Geoffrey Robinson, non déclaré au comité d'éthique. En 2005, David Blunkett, ministre du travail et des retraites, avait été contraint à la démission pour avoir caché ses liens noués avec trois compagnies privées.
Institué en 1995, à la suite d'une série de scandale financiers visant des députés et ministres conservateurs, le Registre des intérêts des membres est publié après chaque élection sous les auspices d'un comité spécial de la Chambre des communes, le Committee on Standards and Privileges. Ce document est remis à jour chaque année. La Chambre des lords possède l'équivalent ainsi que les assistants de recherche et les journalistes accrédités à Westminster. La liste peut-être consultée sur Internet.
Parmi les avoirs devant être déclarés, figurent les actifs immobiliers et mobiliers, les strapontins de directeur non exécutifs de compagnies, les invitations payées à l'étranger, les dons de particuliers comme d'institutions, les emplois rémunérés. S'ajoute le code de conduite édicté par Tony Blair dès son arrivée au pouvoir, en 1997, en vertu duquel "les ministres ne peuvent accepter un cadeau, un service ou une hospitalité qui le place dans une quelconque obligation de réciprocité".
En Suède, le ministre des affaires étrangères du nouveau gouvernement de droite, Carl Bildt, est actuellement sous les feux de l'actualité en raison de ses liens avec Vostok Nafta, une compagnie d'investissement au conseil d'administration de laquelle il a siégé et dont 90 % du portefeuille est composé d'actions Gazprom, le géant russe du gaz. L'ancien premier ministre, qui passe pour avoir amassé une des plus grosses fortunes du pays, a dû vendre en décembre les stocks-options qu'il y détenait, empochant au passage 520 000 euros. Beaucoup se demandent si le ministre sera vraiment indépendant lorsqu'il devra se prononcer sur le gazoduc russo-allemand, qui traversera les eaux suédoises, alors que le principal actionnaire du projet n'est autre que Gazprom.Depuis dix ans, la loi prévoit que les ministres, leurs épouses et leurs enfants doivent déclarer au directeur juridique du gouvernement la liste de leurs avoirs en actions, droits à la retraite et autres avantages qu'ils pourraient continuer à toucher d'emplois précédents. A peine nommées, deux ministres du gouvernement de Fredrik Reinfeldt ont dû démissionner en octobre 2006 pour avoir employé une jeune fille au pair au noir et avoir "oublié" de payer leur redevance télé.
Salvatore Aloïse, Marc Roche et Olivier Truc
Article paru dans l'édition du 20.01.07.
Le Monde
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