Les négociations entre le Parlement européen et les Etats membres sur l'adoption du budget de l'Union pour 2011 s'annoncent ardues. Hier, la Commission budgétaire du Parlement européen a arrêté sa stratégie en accord avec les présidents des différents groupes politiques de l'institution. Le message du parlement est simple : il ne votera pas le budget 2011 tant que les gouvernements des Etats membres n'auront pas apporté de garanties sérieuses sur de nouvelles ressources propres pour l'Union européenne. « Depuis dix ans, la crise institutionnelle autour de l'organisation de l'Union européenne élargie a masqué la crise financière et budgétaire, mais désormais, nous sommes au pied du mur, tant le décalage entre les compétences nouvelles accordées à l'Union par les traités successifs et ses moyens budgétaires s'est creusé », a expliqué hier Alain Lamassoure, président de la Commission budget du Parlement.
Doté depuis l'adoption du Traité de Lisbonne de pouvoirs renforcés sur le vote du budget, les parlementaires européens estiment que les Etats membres doivent faire face à leurs responsabilités. Alors qu'avec le Traité de Lisbonne, ils ont confié à Bruxelles de nouvelles tâches dans les domaines de l'énergie, de l'immigration, de l'espace, et de la politique étrangère, avec la formation du nouveau service européen d'action extérieure sous l'autorité de Lady Ashton, ils réclament la stabilité budgétaire. Une position qui ne fait d'ailleurs même pas l'unanimité, puisque sept Etats, tous parmi les plus riches d'Europe, à l'exception de la France et de l'Allemagne, réclament une diminution des dépenses.
Par le passé, le Parlement a toujours fait contrepoids, réclamant d'ailleurs souvent des hausses irréalistes. «Cette fois-ci, en rupture avec vingt ans de pratique, insiste Alain Lamassoure, le Parlement, conscient de la crise grave que traversent les Etats membres, propose une hausse très modérée des dépenses». Il ne demande qu'une progression de 0,8% des crédits d'engagements par rapport à 2010. En revanche, il réclame aussi que les sommes non dépensées ne soient pas remboursées aux Etats membres, comme c'est le cas actuellement, mais soient conservées par le budget européen. Surtout, il lie le vote du budget 2011 à l'ouverture de négociations sur de nouvelles sources de revenus directes, indépendantes des contributions des Etats. Cette dernière injonction peut paraître faible, mais de fait, les Etats n'ont pas mis le sujet sur la table depuis dix ans, de peur d'ouvrir la boîte de pandore. Rappelons que le budget de l'Union, presque exclusivement constitué de dotations des Etats membres, est, par volonté politique, limité à 1% maximum du PIB des 27.
A la veille du vote en séance plénière le 20 octobre de la proposition budgétaire des eurodéputés pour 2011, le Commissaire au Budget Janusz Lewandowski doit présenter une « communication » sur l'avenir des finances européennes. Il devrait lister toutes les pistes de financement nouvelles, tout en tentant d'actualiser les besoins financiers de l'Union. « Sa communication ne sera pas chiffrée », explique-t-on dans son entourage, « car il faut d'abord se mettre d'accord sur les objectifs avant de parler chiffres ».
Taxe sur l'activité bancaire, mise aux enchères des permis d'émission de CO2, taxe carbone, pourcentage de la TVA sur le commerce intra-communautaire, les projets ne manquent pas. A cette nuance près que les Etats souhaitent conserver les recettes dans leurs budgets, et non les laisser à Bruxelles… Et qu'ils ne sont même pas prêts à discuter du coût des politiques européennes, la plupart des Etats contributeurs nets réclamant simplement de diminuer leurs versements.
Après le vote du 20 octobre, et faute d'accord avec le Conseil européen, un comité de conciliation entre le Conseil et le Parlement aura 21 jours pour rapprocher les points de vue. Le Parlement a le dernier mot. S'il fait de la résistance, le budget de l'année précédente sera reconduit mois par mois jusqu'à ce qu'un compromis surgisse.
ANNE BAUER, BUREAU DE BRUXELLES
Les Echos
Bien à vous,
Morgane BRAVO
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