***Putain, ça fait du bien." Devant un conseil national gonflé à bloc, samedi 13 juin, à Paris, Cécile Duflot savait qu'elle résumait le sentiment de tous ses camarades, en ces lendemains de victoire électorale. Et de ce "petit moment historique", la secrétaire nationale des Verts veut jouer à plein. Tant dans la galaxie écologiste que vis-à-vis de la gauche.
Les écolos ont un "trésor commun" entre les mains, a insisté Mme Duflot : avec 2,8 millions de voix, les listes Europe Ecologie réalisent "le plus beau score jamais atteint en France". S'appuyant sur une dynamique réunissant la "diversité" des écologistes et un message "crédible" sur l'Europe, Europe Ecologie a permis de "marquer la convergence des crises et l'émergence d'une force politique" et talonné le PS, a-t-elle répété. Insistant sur le fait que c'est grâce à leur posture d'autonomie vis-à-vis des autres partis et du PS en particulier que ce succès a été réalisé. Les Verts, souvent embarqués dans les valises du PS, sont bien décidés désormais à jouer à fond la carte de l'autonomie. Il s'agit donc de "transformer l'essai", a proposé Mme Duflot.
D'abord en poursuivant le "rassemblement" : Europe Ecologie, sigle électoral, a vécu mais pas son esprit. Pas de nouvelle organisation immédiate ni de dissolution des Verts. Tous ont reconnu le rôle joué par le petit parti de Mme Duflot : sans lui, point de militants ni d'appareil pour porter la campagne. Il s'agit donc de mettre en place un cadre "souple", "informel", précise la résolution adoptée samedi par le parlement des Verts.
"L'idée est de prendre notre temps. Tout le monde sait que l'avenir de l'écologie se joue aujourd'hui et personne ne veut faire de gaffe", explique Yannick Jadot, député élu dans l'Ouest et ex-directeur de campagne de Greenpeace. "On doit passer de la notion de parti garnison à celui de parti réseau", précise Jean-Vincent Placé, bras droit de la secrétaire nationale.
Le "réseau" se met donc en place à côté des Verts. Les quelque 5 000 comités locaux de la campagne européenne sont appelés à se maintenir et un "comité d'animation et de pilotage" est créé avec l'ensemble des composantes d'Europe Ecologie (parlementaires européens, grands élus Verts, membres de la direction du parti et personnalités issues du milieu associatif).
"NI LIBÉRAL NI PRODUCTIVISTE"
Un calendrier pour faire vivre cette nouvelle configuration a été adopté : une fête des comités Europe Ecologie est planifiée le 4 juillet ; fin août, les journées d'été des Verts à Nîmes seront ouvertes aux personnalités de la campagne ; une convention nationale du "rassemblement" est prévue à l'automne suivie de conventions régionales chargées d'organiser les régionales ; et enfin, en décembre, un "forum national des six heures de l'écologie politique". Tout a été prévu pour faire comprendre que les écolos entendent poursuivre leur aventure commune. Mais en solo. "Notre objectif est simple : faire mieux en construisant une nouvelle force dépassant les clivages traditionnels", a insisté la numéro un.
Les mots sont lâchés : il s'agit de s'appuyer sur le succès électoral pour dépasser les Verts, petit parti marginal, rendu incapable par ses divisions et ses postures radicales de "jouer dans la cour des grands". Mais aussi de tourner la page de son histoire commune avec la gauche. Les régionales de 2010 donneront l'occasion de tester la formule. Les Verts entendent se placer au centre pour négocier au mieux, convaincus qu'ils sont désormais "force pivot". "Il n'y a plus d'alliés naturels mais des alliés potentiels qui doivent rejoindre les solutions écolos", a lancé Jean-Paul Besset, député européen du Centre et ancien bras droit de Nicolas Hulot.
La formule va "tout à fait" à M. Placé : "Nous présenterons un maximum de listes de rassemblement des écolos. On va voir qui porte les propositions de la gauche", assure-t-il. "Ni libéral ni productiviste, on se situe à équidistance du Front de gauche, du PS et du MoDem", résume M. Jadot.
La nouvelle posture a séduit les cadres des Verts qui ont voté - fait exceptionnel - à l'unanimité la résolution politique comme celle sur les régionales. Les écolos se veulent désormais "ailleurs". Seul Noël Mamère, député de Gironde, a fait part de son désaccord : "L'objet politique que nous sommes en train de construire n'est pas fini. Mais nos valeurs sont celles de la gauche, notre camp est celui de la gauche."
Sylvia Zappi
LE MONDE
16.06.09.
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