mercredi, février 04, 2009
*L'Europe entre tensions sociales et tentations protectionnistes*
***Il y a deux mois, le monde observait incrédule les jeunes chômeurs grecs descendre dans la rue, paralyser les instances gouvernementales du pays et bloquer toute activité à Athènes.
Les tensions politiques et sociales causées par le chômage émergent un peu partout en Europe. Grève sauvage contre l'emploi légal de travailleurs migrants au Royaume-Uni, appel à la grève des centrales syndicales en France pour sauvegarder emploi et salaires : la tentation nationaliste attisée par des griefs locaux est bien réelle.
La mondialisation est en crise et les actions de protestation dans l'industrie en hausse. En période de récession, les travailleurs perdent leur emploi, les profits diminuent, le niveau de vie chute et il est plus difficile de joindre les deux bouts. Alors, les bienfaits du capitalisme et du libre-échange sont vite oubliés tandis que la grogne populaire s'étend comme une traînée de poudre.
Actuellement, le ressentiment est alimenté par les mesures des gouvernements européens qui ont vanté les plus-values du capitalisme libre-échangiste et injecté des milliards d'euros pour sauver les banques, mais ont ignoré leurs travailleurs qui, plus que jamais, se sentent autorisés à descendre dans la rue. Même si les mouvements de grève n'ont pas encore causé la paralysie prédite par les syndicats - la centaine de grévistes dans l'est du Royaume-Uni ou les agriculteurs en Grèce bloquant les autoroutes avec leurs tracteurs peuvent restent des incidents isolés -, la prévision d'un taux de chômage de 10 % en 2010 presque partout en Europe pourrait bien transformer le million de travailleurs français descendu dans les rues le 29 janvier en cinq millions la prochaine fois.
UN DÉFI ET UNE GAGEURE
La morsure de la récession est douloureuse. Il ne sera pas aisé de gouverner face au mécontentement national croissant.
La possibilité que des manifestations de solidarité avec le monde du travail se transforment en actions protectionnistes en Europe doit être prise au sérieux. Même si l'Italie est restée silencieuse sur les grèves au Royaume-Uni impliquant des travailleurs transalpins, cet incident a déjà provoqué des tensions de l'autre côté des Alpes.
Les gouvernements, pressés d'apaiser, plutôt que de contrarier leurs administrés inquiets sur l'avenir de leur emploi n'ont pas la tâche facile. La tentation est grande d'instaurer des barrières protectionnistes. Or, restreindre la libre circulation des biens et des services serait un défi lancé aux fondements de l'Union européenne. En réalité, la plus grande gageure pour l'Europe sera de "gérer" ces mouvements de grève avant qu'ils n'empirent.
(Traduction de Marie-Odile Masson.)
LE MONDE
04.02.09
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire