*** Le phénomène Bayrou dans la campagne électorale française
* François Bayrou, candidat de l'UDF (centre-droit) à l'élection présidentielle française, talonne désormais dans les sondages la socialiste Ségolène Royal, tandis que Nicolas Sarkozy, représentant de la droite, est toujours donné gagnant. A six semaines du premier tour, la presse européenne tente de décrypter la percée du candidat centriste.
The Independent (Royaume-Uni)
"La lubie Bayrou est une autre façon d'éviter le changement, pas de le provoquer", considère John Lichfield, correspondant du quotidien à Paris. "Après les culs-de-sacs de l'extrême gauche et de l'extrême droite, la France est maintenant tentée par le cul-de-sac de l'extrême centre. Depuis 24 ans, depuis que François Mitterrand a abandonné le socialisme en 1983, la France a été gouverné par des gouvernements consensuels, étiquetés de droite ou de gauche, qui se débrouillent tant bien que mal. Les 'clivages' idéologiques sont loin d'être le problème de la France. M. Bayrou a une ou deux idées assez raisonnables, sur la dette nationale ou les charges sociales tueuses d'emplois. Il a quelques idées antédiluviennes et corporatistes sur l'agriculture et l'éducation. Il n'a pas la base politique nécessaire pour opérer les changements économiques et sociaux dont la France a besoin et qu'elle réclame. Son parti, l'UDF - les restes de la coalition anti-gaulliste de droite et du centre fondée par Valéry Giscard d'Estaing - manque de fonds, est trop petit et désorganisé pour lui donner la majorité parlementaire lors des élections législatives de juin."
L'Humanité (France)
"Le syndrome Bayrou est un symptôme - ou plutôt un stigmate - d'une sorte de nécrose de notre architecture politique", affirme Claude Cabanes, rédacteur en chef du quotidien communiste. "Quand Ségolène Royal s'écarte des repères fondamentaux de la gauche, quand Nicolas Sarkozy bavarde à l'ombre de Jaurès et de Blum (et par exemple se fait l'avocat de l'État contre 'les prédateurs, les spéculateurs et les fraudeurs'), quand Jean-Marie Le Pen s'autoproclame du 'centre droit', la confusion gagne du terrain. (...) Comme le mouvement des plaques tectoniques, la société française dérive vers les valeurs conservatrices du chacun pour soi. Faute d'une alternative de société. (...) M. Bayrou semble ramasser les fruits amers d'une sorte de 'sauve-qui-peut' électoral général. C'est une impasse totale et une illusion. Il est à Nicolas Sarkozy ce que Pepsi-Cola est à Coca-Cola."
ABC (Espagne)
Le quotidien conservateur estime que François Bayrou peut représenter une véritable menace pour Nicolas Sarkozy, à la différence de Ségolène Royal "qui a largement démontré qu'elle ne possédait pas de programme concret (...). C'est précisément ce manque de consistance de la candidate socialiste qui semble avoir favorisé l'ascension de François Bayrou. Il se présente comme un centriste mais défend, en réalité, plutôt l'héritage de Jacques Chirac, basé sur une conception politique particulière baptisée le 'ninisme' par les politologues français : à savoir un hypothétique point médian qui ne permet pas d'affirmer s'il s'agit de socialisme ou de libéralisme. Mais pour ceux qui ont découvert qu'ils ne pouvaient pas voter pour une candidate aussi creuse que la socialiste, Bayrou peut représenter un choix plus présentable au sein du front anti-Sarkozy."
Der Standard (Autriche)
Pour Stefan Brändle, François Bayrou profite certes de la faiblesse de ses adversaires, "mais il est loin d'avoir gagné. Il s'est attiré les bonnes grâces des Français dans les derniers sondages parce que ces derniers entendent bien montrer qu'il veulent être les seuls à décider qui sera le prochain occupant de l'Elysée - se démarquant ainsi des partis ou des médias, pour lesquels le duel 'Sarko-Ségo' est inévitable. Ces entêtés de Français ont donc le même réflexe qu'en 2002, lorsqu'ils ont fait sensation en portant l'extrémiste de droite Jean-Marie Le Pen au second tour - surtout parce qu'ils ne voulaient pas d'un duel Chirac-Jospin. On est alors en droit de se demander si tout cela ne va profiter à un quatrième homme. Se pourrait-il que Nicolas Sarkozy et François Bayrou se neutralisent au point que Le Pen arrive au second tour fin avril ? Lorsque les autres candidats ne tiennent pas compte du peuple, le candidat du Front national en ressort toujours renforcé."
Courrier International
09/03/2007
samedi, mars 10, 2007
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