***Le gouvernement australien a confirmé cette semaine qu'il mettrait en place un système de filtrage du Web, conçu pour interdire l'accès à une "liste noire" de sites depuis le territoire national. Ce sont les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) qui seront chargés de bloquer l'accès aux sites incriminés. Initialement présenté comme un moyen de lutter contre les sites pédopornographiques, le projet mené par Stephen Conroy, le ministre des télécommunications, a évolué pour embrasser un spectre plus large, englobant notamment la pornographie "classique", voire plus.
Les FAI devront en effet bloquer l'accès à tous les contenus notés "RC" (refused classification, ou "classification refusée"). Cette classification, propre à l'Australie, était à l'origine attribuée aux films jugés particulièrement violents ou faisant l'apologie de la drogue ou de la violence, qui sont alors interdits à la vente et à la distribution, ce qui fut le cas pour Baise-moi ou Ken Park. Le gouvernement mettra en place une liste de sites classés "RC", maintenue à jour par des fonctionnaires et par un système de signalement accessible au grand public.
Les associations de défense des droits civiques australiennes se sont vivement opposées au projet, arguant qu'il allait mettre en place un mécanisme de censure d'Etat qui pourrait aisément être détourné de son but originel. En mars dernier, la première liste noire préparée par le gouvernement australien, censée rester secrète mais publiée sur le site Wikileaks, a en partie donné raison aux associations : sur le millier de sites que contenait la liste, seule une partie concernait effectivement des sites pédopornographiques. Le reste comportait des sites pornographiques légaux ou consacrés au poker, mais aussi des pages consacrées à l'euthanasie, au satanisme ou à l'anorexie.
"Depuis les dernières élections [en 2007, ndlr], le but du plan de 'cybersécurité' du gouvernement est passé de la fourniture d'outils pour protéger les mineurs sur Internet au blocage de contenus qui sont par nature destinés aux adultes", estime la division australienne de l'Electronic Frontier Foundation.
Sur le plan technique, la faisabilité du système proposé par le gouvernement avait également fait l'objet de critiques, les FAI estimant que la mise en place de la liste ralentirait notablement le trafic. Avec plusieurs mois de retard, le gouvernement a finalement accepté de publier les résultats d'un premier test effectué cette année, que le ministère juge concluant. Les FAI jugent cependant que le test portait sur une échelle trop petite, et que le système serait de plus inefficace. Le filtrage ne portera en effet que sur les pages Web, et n'inclura pas les réseaux P2P ("pair à pair") ou Usenet.
Le moteur de recherche Google a également fait part de son "inquiétude" après l'annonce de la mise en place de ce filtrage, "le premier filtrage obligatoire décidé par une démocratie occidentale", et des limitations qu'il imposera à la liberté d'expression. Le gouvernement australien affirme que le choix des sites bloqués sera particulièrement surveillé pour éviter toute dérive, mais le fait que le contenu de la liste noire soit secret rendra toute procédure de contrôle difficile, préviennent les associations.
LE MONDE
17.12.09
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