samedi, avril 07, 2007
*Quand la presse internationale sonde la France profonde*
***** Plus le premier tour approche, plus les journalistes étrangers se penchent sur les maux de la France. Un pays, selon eux, malade et déprimé.
** Après le temps des présentations des candidats, beaucoup de quotidien internationaux se sont décidés à sonder la France en profondeur et à multiplier les reportages sur ce pays communément décrit comme "malade", "à la croisée des chemins" ou encore "rêvant de changement". Cela veut aussi dire que les équipes de reporters et de correspondants ont été renforcées à quinze jours du premier tour.
Même The Hindu, le grand quotidien anglophone indien, s'est fendu d'un éditorial sous forme de reportage pour tenter de faire comprendre les enjeux de l'élection française à ses lecteurs. La journaliste a décidé de suivre une certaine Christine Perez, une mère de famille de 41 ans, qui a décidé d'organiser en famille sa propre élection présidentielle. De dîners en dîners, à force de faire voter amis et familiers, elle est parvenue à mobiliser "jusqu'à 25 personnes la semaine dernière". Conclusion de The Hindu : "Les Français se passionnent pour cette élection."
Et le quotidien de poursuivre : "Les Français ne feront certes pas la révolution par les urnes, mais le prochain président sera le (ou la) candidat(e) qui saura le mieux incarner le changement que le pays réclame." Et le problème est qu'aucun des prétendants ne semble s'imposer vraiment. "M. Sarkozy est perçu comme trop autoritaire, despotique, répressif et trop libéral par une partie de la droite classique. De son côté, Mme Royal a suscité les doutes de la gauche traditionnelle sur ses capacités de gouvernance et sa connaissance des affaires étrangères. D'où l'émergence de François Bayrou, le troisième homme de cette élection." Bref, The Hindu sait qu'il ne sait rien… comme à peu près toute la presse internationale d'ailleurs.
Aussi, plutôt que de se perdre en conjectures, The Guardian a-t-il décidé de multiplier les reportages. Angélique Christafis s'est ainsi rendue à Lille pour sonder une population – celle du Nord – particulièrement touchée par le chômage. Elle y a rencontré Dominique Regueme, un jeune homme de 24 ans au chômage depuis deux ans qui rêve d'être monteur de cinéma et qui "n'a même pas les moyens – après avoir payé son loyer de 360 euros – de se payer une place de cinéma". Des jeunes gens comme ça, la correspondante du quotidien londonien en a rencontré des dizaines. Ils appartiennent à la "génération S, comme stagiaire" et sont souvent au chômage ou occupent des boulots sous-qualifiés.
"Le chômage de masse est en train de détruire ce pays", ajoute le jeune Dominique, qui explique "le malaise général" et la violence sous-jacente. La journaliste britannique explique même que, pour trouver du travail – n'importe quel travail – les Nordistes passent la frontière belge pour se faire embaucher au moment de la récolte des asperges. Un travail ingrat et mal payé, mais un travail tout de même.
Et lorsque le genre reportage s'épuise, il est alors temps de redevenir politique, à l'instar du Houston Chronicle, qui, dans un éditorial assez drôle, tente de trouver un équivalent à François Bayrou aux Etats-Unis. C'est-à-dire, explique l'éditorialiste, quelqu'un qui permettrait à la politique américaine de sortir du tête-à-tête républicains-démocrates. Il faudrait en somme "un démocrate raide ou un républicain de gauche". Le journaliste (Cragg Hines) se souvient de l'aventure de Ross Perot, un milliardaire politiquement 'indépendant' qui avait un temps porté les espoirs de ceux qui voulaient sortir du bipartisme. Une aventure courte et coûteuse. Il reste tout de même le maire de New York, Michael Bloomberg, "un ex-démocrate qui est suffisamment riche pour utiliser une partie de sa fortune pour se payer une campagne et qui est assez loin des républicains pour s'être fait élire à la mairie de la Grosse Pomme".
Mais, rappelle le Houston Chronicle, "rappelez-moi la dernière fois qu'un milliardaire juif mesurant moins de 1,70 mètre et originaire de New York a réussi à se faire élire à la Maison-Blanche ?" En clair, l'extrême centrisme, c'est pour la France et nulle part ailleurs.
Anthony Bellanger
COURRIER INTERNATIONAL
6 avr. 2007
Photo: DR
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